Je ne voudrais pas souffrir ;finir comme un chien ,l'œil humide et implorant !Si je devais dans la ronde des blouses blanches vivre un enfer, certes pavé de bonnes intentions ,que cesse le ballet sur le mont chauve,que l'on écourte la danse macabre,que les violons rendent l'âme ...même au supplice jamais ne serais un tantale !Trop vu de "bougies"éteintes dans les mains d'un "sorcier". Au tableau noir j'ai toujours préféré la page blanche,celle où tout peut s'écrire...Bien sûr en réaliste aigu je me suis préparé au pire,mais mon instinct de joueur, dans un océan d'incertitudes, mise sur la possibilité d'une île.Nous sommes le vingt-neuf mai.Comme tous les matins au lever,après avoir ouvert le volet roulant ,j'écarte les rideaux pour contempler mon jardin.Crevant le manteau gris,le soleil brille comme un bouton d'or.Si le vénérable pommier grisonnant de lichens est dépouillé de sa blanche parure ,l'indisciplinée passiflore par ses filaments bleus ceints de pétales blancs scintille sur la verte palissade .L'azalée rose, vieil hôte de ce jardin,au pied de l'envahissant forsythia gavé de chlorophylle, défend timidement son petit carré .Coincées entre le bien planté rhododendron, rose lui aussi et le massif d'hortensias aux touches bigarrées dignes de Signac, les graciles trémières pointent le nez chez la voisine. Les lourdes grappes de la glycine,en une cascade mauve s'écoulent sous l'appentis trop gris.Aux rosiers postés entre terrasse et pelouse,sentinelles galonnées comme des généraux mexicains réplique un audacieux framboisier ,tandis que des pivoines à l'ombre du pommier giclent le rouge sang.Plus près de la maison dans un parterre cerné de pierres moussues,un fuchsia adopté voilà deux printemps, par ses pampilles pourpres nous rend grâce .Un jasmin blanc camoufle avec élégance la cuve à fuel de mon voisin adossée au mur mitoyen .Ah... en face,de l'autre côté de la terrasse,bien protégé par un muret de pierres sèches,c'est un festival de plantes grasses,les arômes qui résistent à toutes mes tentatives d'éradication,une fougère transfuge de chez ma fille ,et des hellébores noires surnagent dans cette joyeuse luxuriance .Comment se lasser de ce tableau ?Je ne saurais dire si les visiteurs emplumés se délectent comme moi de ces parfums et couleurs,mais leurs visites participe à mon bonheur quotidien .Le geai toujours en vadrouille,les pies bagarreuses que je vis avec étonnement chasser un robuste corbeau,les pigeons indolents,et la petite escadrille de moineaux,rouges gorges,mésanges et autres bergeronnettes abonnés ou non à la pitance,tous me ravissent .Il est dix heures .Je décroche le téléphone.J'appelle SOS médecins,la douleur est trop vive .