Embarqué chez les "ouvriers du port",qu'au son de la puissante sirène qui appelait ceux que ta mère ,à l'instar de nombreux Brestois, nommait les"crabes dormeurs",tu moquais pourtant depuis ton enfance.( qu'ils fussent des crabes peut-être ...oui mais aux pinces d' or ).Il ne faut jamais dire fontaine ...et donc pour ne pas rester en rade, après avoir quitté "l'esquif"tu entrais au service de la "flotte".Tu essuyas quelques tempêtes,"matelot"il te fallut maintes fois réduire la voilure,mais baisser pavillon ... tu ne t'y résolus jamais !Et si jamais non plus tu n'aimas l'haleine des anciens, fleurie aux lourds relents du "cambusard",celle des plus modernes parfumée aux senteurs provençale,à la truculence désinhibée des "docteurs","professeurs"et autres "honoris causa",tu ne t'interdisais pas d'applaudir .Bien sûr la cyclothymie "saoulographique" t'irritait.Tu ne goûtais guère l'alcool et sans faire la chasse aux consommateurs excessifs comme les appelait la médecine, tu n'en partageais pas les festivités .Dans les années 80 après un coup de gueule intempestif,un claquage de porte,tu fus expédié à l'atelier du poste 8.Ici la densité de "suceurs de glace"aurait fait fondre la banquise aussi sûrement que le réchauffement climatique.Bon contre bon cœur, tu fis bonne fortune.Tes galons, certes gagnés au"charbon",te furent enfin donnés.Espiègle toujours,tu multipliais les blagues pas toujours appréciées.Ainsi le sifflet pour pot d'échappement que tu dégotas dans un commerce de farces et attrapes ,qui bien introduit dans cette sortie amena un jeune collègue à se faire arrêter par les gendarmes maritimes.Une remarque te fut adressée par un de ses proches,"c'est dégueulasse ce que tu as fait à Gil ...";mouais c'est bizarre comme la rétorsion est toujours mal vécue!Une autre fois dans le petit local dédié au découpage au chalumeau,mais qui nous servait le plus souvent au repli stratégique,boire un café,noircir une grille de mots croisés ou simplement papoter (débiter des conneries sur Jésus le Nazairien dont le père était charpentier aux chantiers de Penhoët),alors que tu buvais un café,un soudeur déposa sur la plaque de contreplaqué faisant office de table,une bouteille de rouge,puis s'en retourna,peut-être chercher un tire bouchon.Aussitôt tu la dérobas et la mis en lieu sûr .Tu l'entendis bougonner puis s'adressant à toi:"je sais que c'est toi" fulmina t-il.Passé un mois ,alors qu'ils étaient quatre réunis pour une collation,tu leur offris la "négresse"subtilisée dans ce même local ."Oh merci Gilbert,c'est sympa".Ha ha ha tu n'est pas un mauvais diable ,après tout ce n'était pas à toi de faire le gendarme !Bon je me laisse aller à des souvenirs pas toujours glorieux .Mais ce qui me consterne c'est l'idée d'avoir à subir les conséquences du crapahutage dans les bords insalubres.Je me revois progresser dans le vaigre(double coque)ou me faufiler dans les endroits les plus improbables des bâtiments de guerre .Demain est un autre jour:le jour de l'opération .